Extrait de TERRITOIRE DES OMBRES
(Septembre 2018)
Tu devais fusionner, dans ton ventre gigantesque,
les musiques jeunes et celles des combats à mener,
abriter des communions païennes et dantesques
afin d’unir nos solitudes en une belle fraternité.
Ta silhouette, parsemée de rougeoyants deltas,
renvoyait les sceptiques à leur incompétence,
face aux murs qu’entre eux dressent les états
tu demeurais ouvert sur l’humaniste mouvance.
Clark répondait à Warhol au sein de tes entrailles,
la lumière de Turell au travers des moucharabiehs,
les passerelles suspendues à tes noires murailles,
comme à ceux d’un navire, vers les cieux s’élançaient.
L’énergie était partout, émanant de ta conception,
les fleurs de van Gogh, sous le rock, frémissaient,
Stadium populaire pour les peuples des nations,
à l’atavisme joyeux, n’aspirant qu’au partage de la paix.
Les jaloux habitués à la soumission institutionnelle
t’ont condamné à la déchéance, à un supplice si rude.
La droite extrême te traitait de fasciste, toi l’universel,
qui, sans renier le Nord, partageais le chant du sud.
Ainsi notre société rejette le risque et la création
lorsqu’ils ne sont pas formatés par l’arrogance,
ceux qui votent les budgets ignorent la passion,
leur vision du monde sent l’égoïsme et le rance.
Aujourd’hui, tu es là sans l’être, mystérieux monolithe,
tes flancs souillés par d’étranges signes cabalistiques,
les collines couvrent ton parvis d’un flot rouge de bauxite,
ton palmier mutilé évoque l’abandon et non plus l’Afrique.
Semblable à un souverain déchu, exilé aux enfers,
malgré les outrages, tu restes drapé dans ta dignité.
Comme toi, sans travail, oublié… je demeure solitaire,
je suis venu sous ton ombre te faire un signe d’amitié.
En hommage au stadium de Vitrolles et à son Architecte Rudy Ricciotti
Août 2017 – Jean-Claude Di Ruocco
Très beau texte qui résume assez bien la situation de cet édifice. La fin avec la relation avec un homme sans travail et ce bâtiment abandonné est très judicieuse