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LAURE DU BOUT DU MONDE – Pierre Magnan

ART SUD – Numéro 54
3ème Trimestre 2006

Après avoir dit adieu à l’inspecteur Laviolette, après avoir rendu hommage à Jean Giono au travers d’un livre absolument passionnant et couché sur le papier ces fabuleux témoignages que sont ses autobiographies, il semblerait que Pierre Magnan est décidé de nous raconter son pays d’une manière différente même si c’est toujours avec le même talent. Il nous livre ici l’étourdissante histoire de Laure, 750 gr à la naissance, qui va survivre et s’épanouir au sein d’un pays de montagnes dont la rudesse n’a d’égale que la détermination des hommes d’extraire de son sol le pain mais aussi la dignité qui les tient debout a force de labeur et de sacrifice, souvent armés d’un amour qu’ils n’osent pas nommer.
La facilité serait d’écrire que jamais aucun des livres de Pierre magnan n’a touché de si près que celui-ci le territoire de Jean Giono, mais ce serait oublié un peu vite que ce pays avant d’être celui du père du Hussard est tout autant, sinon plus, celui de l’auteur de La Maison Assassinée. Giono avait une vision plus intellectuelle et poétique de ce peuple de la terre qu’il chérissait, certes, mais dont il nous livrait une description plus globale. C’est là que Pierre Magnan, dans ce livre, le surpasse sur le plan du réalisme, car le maître n’a jamais pénétré aussi profondément dans la réalité de ces existences ancrées dans la dure réalité de la terre, alors que l’auteur de ce livre l’a vécu de l’intérieur, il est un des leurs. Sans aller à parler de naturalisme, ce roman magnifique, où l’univers de Pierre Magnan est bien présent, nous délivre un témoignage précieux sur une époque proche et pourtant qui s’éloigne si vite de notre réalité.
Ce livre c’est le chant des humbles, un chant authentique, dénué de pathos, car s’il respire le bonheur jusque dans ses moindres drames, il n’en demeure pas moins une véritable Symphonie Pastorale. Cette référence à André Gide n’est pas là pour faire plaisir à l’auteur, mais bien parce qu’il est clair que ce livre peut prendre place sans problème au panthéon des œuvres marquantes qui jalonnent la vie littéraire de ce pays, qui peut s’enorgueillir de compter, mais nous le savions depuis longtemps, un monstre sacré de plus et surtout une bel être humain dont le message est à jamais celui de l’amour, de la paix et du partage.

Jean-Claude Di Ruocco

286 pages – Denoël – 18 euros

 

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