ART SUD – Numéro 53
2ème Trimestre 2006
C’est de Paris où il vit en exil, que l’auteur adresse à sa famille et plus particulièrement à ses parents disparus, ce témoignage poignant. L’enfance de cet homme fut sacrifiée par un père, qui n’eut de cesse de maudire et de malmener les siens au nom d’un Dieu dont son ignorance lui avait fait détourner le message, au point de devenir esclave de sa foi. C’est pour cette raison entre autres, qu’a dix-neuf ans, l’auteur rejoint les moudjahidin du peuple de Massoud Radjavi. Il luttera contre les mollahs de Khomeiny, le guide de la révolution islamique qui va instaurer en Iran une dictature impitoyable, qui fera un nombre important de morts, notamment au sein de la jeunesse Irannienne. Elle qui croyait avoir enfin accéder à la liberté après la fuite du Sha et qui n’aura d’autre choix que de se plier aux règles archaïques du pouvoir religieux ou prendre les armes. C’est ce que fait Raphaêl Djavani (né Karim). Devenu un rebelle, il finit par perdre son identité à force d’en user de multiples pour échapper aux militaires qui le recherchent. Missions, trahisons, famille menacée et exils se succèdent au cœur d’un monde clandestin où règne une violence aveugle. Iran, Kurdistan, Irak, France… sa fuite éperdue le mène à se poser maintes questions et le doute s’installe : Jusqu’où devra-t-il payer le prix du sang ? L’enfant du blé est un livre superbe car honnête, objectif et sans concession. Bien plus que le récit de son parcours initiatique et le portrait d’un pays livré au totalitarisme, c’est le témoignage émouvant d’un homme en quête d’amour pour lui et les siens, pour son pays… une souffrance que l’on sent à jamais gravée dans sa chair et qui mouille nos yeux parce que nous lui sommes redevable de ce témoignage, véritable hymne en faveur de la liberté.
Jean-Claude Di Ruocco
290 pages – Flammarion – 18 euros